P. Eggenberger et al.: Romainmôtier : mille ans de monachisme

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Titel
P. Eggenberger et al.: Romainmôtier : mille ans de monachisme. Résultats des recherches archéologiques entre 1971 et 2006


Autor(en)
Eggenberger, Peter; Perréard Lopreno, Nicolas; Geneviève; Schätti, Nicolas; Plan, Isabelle; Weidmann, Denis
Reihe
Cahiers d’archéologie romande
Erschienen
Lausanne 2020: Société d’histoire de la Suisse romande
von
Laurent Auberson

Très attendue, cette volumineuse synthèse, dont l’auteur s’est entouré de nombreux spécialistes, vient clore le dossier scientifique de l’étude du site de Romainmôtier. Elle s’inscrit dans le prolongement de la publication collective Romainmôtier. Histoire de l’abbaye (BHV 120, 2001), dirigée par Jean-Daniel Morerod, la publication sur l’église (CAR 145, 2014) et les recherches sur les chartes d’Alexandre Pahud (MDR 4, XVI, 2018).

Le titre et le sous-titre montrent bien qu’il s’agit avant tout d’une interprétation des résultats archéologiques en regard des documents historiques. Des thèmes comme la seigneurie temporelle par exemple, son fonctionnement et son territoire ne sont donc traités que marginalement. Les chapitres du premier volume présentent ainsi les étapes successives depuis les bâtiments gallo-romains antérieurs à la première église jusqu’aux derniers temps du prieuré. Les questions historiques les plus délicates — celle avant tout des origines du monastère (voir ci-dessous le compte rendu de l’ouvrage de Laurent Ripart) — sont traitées de manière synthétique et très lisible, avec l’appui d’une iconographie soignée (plans et dessins de reconstitution dans lesquels l’orientation du lecteur est judicieusement facilitée par de petits schémas). Aux pages 36-37 (dans le chapitre écrit en collaboration avec Nicolas Schätti), le « tableau synthétique de l’histoire du site avant l’arrivée des Clunisiens au X e siècle » est non seulement utile, mais aussi tout à fait exemplaire parce qu’il met en parallèle les données de la documentation historique et les éléments archéologiques concrets, aussi ténus qu’ils puissent être, avec un renvoi aux listes des structures dans le second volume. Outre qu’il remplace avantageusement de longues pages de texte, ce tableau a également le grand mérite de faire la part entre les interprétations sûres et les conjectures.

Pour être synthétiques, les descriptions de chacune des phases sont très détaillées, et ont pour seul défaut de n’être pas structurées par des sous-titres. Cela aurait permis par exemple de mieux mettre en évidence un élément d’importance, la naissance du cloître au sens architectural, dans la troisième phase.

La mise en relation de l’architecture et de la sculpture (non seulement la sculpture architecturale en place, mais aussi les éléments épars du dépôt lapidaire) évite une lecture trop muséographique de ces derniers. Une étude d’Isabelle Plan et Denis Weidmann sur l’ambon de Romainmôtier, incluant ceux de Baulmes et de Saint-Maurice (pp. 169-198), enrichit la description et l’interprétation des éléments sculptés. Le site prioral de Romainmôtier ayant aussi été un lieu d’inhumation (dans les galeries du cloître et à l’extérieur), l’étude anthropologique de Geneviève Perréard Lopreno (pp. 199-224) apporte un éclairage complémentaire. Elle se conclut judicieusement par une synthèse en forme dialoguée : « Les conclusions de l’anthropologue : qui a été inhumé à Romainmôtier ? / Les conclusions de l’archéologue : l’inhumation dans le cloître. » Les vingt dernières pages du premier volume sont occupées par un index-glossaire des noms propres et thèmes historiques, index extrêmement précieux, mais où il aurait peut-être été préférable de faire la distinction entre noms de lieux, noms de personnes et matières.

Le second volume réunit en plus de 300 pages la documentation exhaustive sur les éléments archéologiques observés (listes, photographies de détail, dessins de plans, élévations et stratigraphies) et les objets mobiliers découverts, de même que la liste des sépultures. La possibilité ainsi donnée au lecteur de vérifier à peu près toutes les interprétations a pourtant son prix: la masse d’informations, dont la qualité, certes, honore les scientifiques qui l’ont élaborée, mais dont on est en droit de se demander si elle a vraiment sa place dans une publication imprimée. La bibliographie est abondante (40 pages) et intègre les recherches les plus récentes. Pour la commodité d’usage, elle aurait pu peut-être figurer à la fin du premier volume. Nous pouvons seulement réitérer ici le regret qu’il n’y ait pas eu de coordination avec les recherches parallèles de Laurent Ripart (voir ci-dessous).

Peter Eggenberger, l’auteur principal, qui a été notre maître et à qui nous devons beaucoup, ne nous en voudra pas de relever quelques imprécisions historiques tout à fait minimes. Sur la carte fig. 19 (p. 49), le contour de l’aire burgonde n’est pas très crédible en incluant trop généreusement l’aire rhétique. En outre, s’il s’agit bien là de la situation au VIIe siècle, la présence de l’île Saint-Pierre ne se justifie pas, car le premier monastère est dit carolingien dans la littérature autorisée. Un autre problème est la mention d’Orbe parmi les dépendances de Romainmôtier. On ne saurait parler d’un « prieuré » d’Orbe quand lesdites dépendances se limitent à une église et à l’hôpital. Les prieurés clunisiens ont des fonctions qui généralement les assimilent à des églises paroissiales (que parfois ils absorbent), et à Orbe la fonction paroissiale s’est maintenue dans une autre église. À notre sens, ce nom ne devrait donc pas figurer au titre de prieuré dans l’index, tandis que sur la carte fig. 34 (p. 77), le terme d’« établissement religieux », ne pouvant plus désigner que l’hôpital, est peut-être un peu inadéquat.

Remarques sur des points minimes, avons-nous dit. Il nous reste surtout la satisfaction et le plaisir de disposer maintenant d’une synthèse solide, définitive et de grandes qualités sur ce site de première importance pour l’histoire du christianisme en Suisse

Zitierweise:
Auberson, Laurent: Rezension zu: Altermatt, Urs: Vom Unruheherd zur stabilen Politik : der schweizerische Bundesrat 1848-1875 : Teamplayer, Schattenkönige und Sesselkleber, Bâle 2020. Zuerst erschienen in: Revue historique vaudoise, tome 130, 2022, p. 219-220.

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Zuerst veröffentlicht in

Revue historique vaudoise, tome 130, 2022, p. 219-220.

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